Communiqué
Des nématodes pour lutter contre des insectes ravageurs
17 janvier 2013
Le laboratoire de recherche en écologie chimique (FARCE) de l’Université de Neuchâtel a décroché un subside de 500'000 francs du Fonds national suisse de la recherche scientifique pour participer au Programme national de recherche 68 « Utilisation durable de la ressource sol » qui débute ce mois-ci. Dirigé par Ted Turlings, le laboratoire FARCE cherchera à mieux cerner le potentiel des nématodes entomophages, ces minuscules vers souterrains prometteurs en matière de lutte contre les insectes ravageurs de plantes.
Les attaques souterraines des plantes, que ce soit par des porteurs de maladies ou par des insectes, seraient responsables de quelque 30% des pertes dans les récoltes. Lutter contre les ravageurs au niveau des racines représente d’autant plus un défi qu’il est difficile d’agir sur ces zones avec des pesticides, solution qui se voit d’ailleurs de moins en moins acceptée dans la population. Alors que le sol regorge de microorganismes susceptibles de contribuer à la protection des plantes, le potentiel qu’ils offrent n’a été que peu étudié jusqu’à présent.
Les nématodes, appelés également vers ronds, font partie de cette faune souterraine. Il existerait un million d’espèces, dont 28'000 ont été effectivement décrites. Plus de la moitié des espèces de nématodes connues présente un cycle de vie basé sur le parasitisme. Ces organismes ont donc besoin d’un hôte (plante, animal ou être humain) pour se reproduire.
L’équipe neuchâteloise s’intéresse aux nématodes entomophages (ou EPN) qui sont spécialisés dans le parasitisme d’insectes. Ces organismes de l’ordre d’un millimètre de longueur s’avèrent utiles pour l’agriculture dès lors qu’ils s’attaquent à des ravageurs de plantes. Leur rapide pouvoir de destruction en fait des candidats idéaux de lutte biologique opérant au niveau des racines. L’étendue des cibles souterraines que les EPN peuvent infecter comprend les formes larvaires de papillons, coléoptères et mouches, ainsi que des crickets et des sauterelles adultes. Un tel spectre promet un champ d’applications extrêmement vaste.
Mieux cerner le mode opératoire des EPN utiles et évaluer leurs performances suivant le type de sol sont au coeur du projet que le laboratoire de Ted Turlings entend mener dans le cadre du PNR 68. Pour ce faire, les scientifiques comptent établir un inventaire des espèces présentes dans les sols helvétiques et mesurer l’efficacité des EPN disponibles dans le commerce. Leurs objectifs visent aussi à mesurer l’effet des pratiques agricoles (monoculture, rotation des cultures, cultures mixtes, etc.) sur les EPN, ainsi qu’à optimiser des combinaisons entre des EPN, des bactéries et des champignons utiles en vue d’améliorer les performances des cultures.
Le blé et le maïs serviront de plantes modèles dans ce projet. Ces céréales sont importantes pour la Suisse, occupant respectivement des surfaces de 80'000 et 12'000 hectares par an. Du côté des nématodes, deux genres, Steinernema et Heterorhabditis, ont été retenus en raison des caractéristiques adéquates qu’ils présentent pour servir d’agents de contrôle biologique. Le subside obtenu servira à financer durant trois ans une post-doctorante en charge de la recherche, ainsi qu’une partie du salaire d’un technicien à quoi s’ajoute la participation à des frais administratifs et de coordination scientifique entre différents groupes du PRN 68.
Contact :
Prof. Ted Turlings
Laboratoire FARCE (Recherche fondamentale et appliquée en écologie chimique)
ted.turlings@unine.ch
Tél. 032 718 31 58
Groupes de nématodes, au microscope électronique
Photo : Ivan Hiltpold, UniNE