Communiqué

Neuchâtel, le 26 mai 2008.  En 2007, deux milliards d'euros ont été investis par les équipes des cinq meilleures ligues européennes pour le transfert de joueurs. 710 millions d'euros rien qu'en Angleterre ! Le sport le plus populaire au monde génère une économie fortement polarisée. A l'Université de Neuchâtel, une thèse de doctorat en géographie humaine considère le cas des joueurs africains dans ce phénomène de globalisation.

75 millions d'euros pour faire passer Zinédine Zidane de la Juventus au Real Madrid. 61 pour transférer Luis Figo (du FC Barcelona au Real Madrid). Et « seulement » 47 pour déplacer Rio Ferdinand de Leeds United vers Manchester United... Ces vingt dernières années, le marché des transferts de joueurs s'est fortement développé. Cinq pays génèrent 53% du chiffre d'affaire des clubs de football en Europe (12, 6 milliards d'euros). Dans cette économie de plus en plus polarisée, l'Angleterre occupe une position dominante. Et l'Afrique ?

Dans sa thèse de doctorat à l'Université de Neuchâtel, Raffaele Poli s'est intéressé aux trajectoires des footballeurs africains Comment expliquer leur présence dans les clubs professionnels européens ? Combien de laissés-pour-compte pour une « success story » à la Adebayor ? Le collaborateur scientifique du Centre international d'étude du sport a cherché à comprendre comment les acteurs impliqués dans ces réseaux tirent profit des différentiels de richesses entre pays pour approvisionner le marché européen en jeunes talents. Des acteurs principalement identifiés comme les agents de joueurs, ces personnes chargées d'assurer le lien entre les joueurs et les clubs intéressés à les « acheter ».

Dérive vers la clandestinité

« Acheter » est employé ici à bon escient, car c'est bien d'économie qu'il s'agit. A travers l'exemple du commerce des footballeurs africains et de leurs migrations, Raffaele Poli, qui est également co-fondateur de l'Observatoire des footballeurs professionnels, met en exergue différents processus à l'oeuvre dans ce phénomène de globalisation. Il se penche ainsi sur la nouvelle division internationale du travail et la délocalisation de la production dans les pays du « Sud ». En abordant la segmentation du marché du travail et le besoin des économies centrales d'une main d'oeuvre « bon marché » provenant de pays pauvres.

Appâtés et emmenés en Europe par des recruteurs, de jeunes footballeurs finissent trop souvent dans l'illégalité et la précarité. Incapables de réaliser les prouesses qu'on attendait d'eux, honteux de retourner dans leur pays, ils n'ont alors que la clandestinité comme solution.

Un documentaire sur le football tourné au Cameroun par Raffaele Poli et Jean-Denis Borel en mars 2008 sera diffusé au terme de cette soutenance de thèse qui se tiendra le lundi 2 juin, à 14 heures, à la salle RE 48 de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de l'Université de Neuchâtel.