Cognition, société, culture
Notre groupe de recherche se veut résolument interdisciplinaire et il associe volontairement des doctorant-e-s, post-doctorants et chercheurs venus d'univers scientifiques divers afin de mieux comprendre la nature sociale des êtres humains. Les problématiques fondamentales portent aujourd'hui sur la confiance dans le témoignage d'autrui, la socialisation, les capacités sociales précoces, l'acquisition et le changement de croyances, l'émergence des intérêts et des passions, la métacognition.
Une partie considérable de nos croyances reposent sur le témoignage d'autrui. Nos sens et notre intelligence ne peuvent nous instruire du destin de Napoléon, des ellipses des électrons ou des mystères de la Trinité. Comment, face à cette dépendance épistémique, calibrons-nous notre confiance dans les dires d'autrui? C'est à cette question qu'une partie des membres du laboratoire travaille depuis plusieurs années. Une collaboration de longue date avec Paul Harris (Harvard) et Melissa Koenig (University of Minnesota), nous a entraîné à rechercher comment les jeunes enfants évaluent la fiabilité du témoignage d'autrui. Avec Dan Sperber, nous avons élaboré un modèle dit de la «vigilance épistémique» qui met en doute la métaphore de l'enfant comme une "page blanche" qui absorbe les éléments de son environnement culturel. Le but des travaux en cours est de mettre en évidence les stratégies cognitives et affectives que les jeunes enfants mettent en oeuvre pour filtrer les informations qui leur sont communiquées.
Pour la plupa rt de s sociologues, la socialisation correspond à une période essentielle pendant laquelle les individus "entrent en société". Si les nouveaux-venus ne reprenaient pas à leur compte une bonne partie des normes et des valeurs de leur communauté d'appartenance, celle-ci finirait pas disparaître faute de "suppôts". Or ce processus est rarement étudié en tant que tel. Une partie des efforts de notre groupe consiste à observer de près les interactions entre des individus "qui en savent davantage" et ceux qui doivent apprendre d'autrui. Ces relations de transmission sont étudiées de manière ethnographique, aussi bien de manière verticale (entre parents et enfants), qu'horizontale (entre pairs dans les garderies). Un des phénomènes qui retient plus spécifiquement notre attention est celui de l'intérêt: comment se fait-il que les enfants s'intéressent plus à certains objets ou événements? En quoi la présence et les réactions d'autrui déterminent leur propre intérêt pour quelque chose? Comment se mettent en place les passions humaines?
Le concept de croyance est, pour ainsi dire, "biface". Il renvoie d'une part aux processus mentaux individuels qui déterminent ce que l'on tient pour vrai et, d'autre part, à des représentations sociales plus ou moins largement partagées par les membres d'un groupe. Les réflexions de notre groupe visent (1) à préciser la nature des processus mentaux qui sous-tendent nos adhésions, (2) à utiliser les connaissances psychologiques contemporaines pour mieux comprendre la manière dont les représentations se diffusent et deviennent des représentations culturelles, (3) à analyser des situations où les individus ont adhéré à des propositions manifestement erronées ou douteuses afin de mettre en évidence les mécanismes de la crédulité. Grâce à un projet européen mené en collaboration avec Joëlle Proust (CNRS), les dimensions métacognitives propres aux phénomènes de croyance vont également pouvoir être approfondies.
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